L’histoire de Dahn

 

 

L’aventure commence un soir du mois de mai où Willy et moi décidons de refaire un enfant notre 6ème et dernier, ayant un utérus cicatriciel (césarienne) je ne pouvais plus en avoir après.

 

04 juillet : Je n’ai pas de retard de règle mais je sens que je suis enceinte, je décide d’aller faire un test de grossesse au laboratoire le plus proche de chez moi et l’attente est insupportable je les appelle toutes les heures pour savoir s'il y a mes résultats.

14h00, je les harcèle une fois de plus et là les résultats viennent tout juste d’arriver et la laborantine me dit : "Oui, vous êtes enceinte." Que je suis heureuse, il ne s’est pas fait prié ce bout d’chou pour arriver. Voilà une nouvelle aventure qui commence. C’est décidé : pour ma dernière grossesse, ce sera la surprise, on ne veux pas connaître le sexe de bébé avant la naissance. Ce sera notre petit « kinder ».

 

 

12 juillet : Ce matin j’ai mal au ventre, j’ai peur de le perdre, je téléphone au gynéco qui me donne un rendez-vous le lendemain, jour de notre déménagement. Ce n’est pas grave.

 

 

13 juillet : Je vais chez le gynéco qui soupçonne 2 bébé.s Je me fait a l’idée d’avoir des jumeaux, sinon tout va bien, super, je repars tranquille pour mon déménagement.

 

 

Fin août : Rendez-vous chez le gynéco, Willy viens avec moi. Le gynéco préfère voir ses patientes tous les mois pour s’assurer que tout va bien. Là il me dit qu il n'y a qu’un seul bébé. Ce n’est pas grave, je suis super heureuse mais cela n’a pas duré.

 

 

Fin septembre : J’ai rendez-vous, je décide d’emmener ma filleule qui doit être la marraine de ce petit bout mais elle ne le saura qu’a la naissance. Le gynéco nous fait écouter le cœur du bébé et Manon a même sursauter en croyant qu'il y avait de l’orage. Il me dit : « C’est un cœur qui bat de plein de plein cœur.»

Oui, il battait si fort pour nous  dire au revoir car ce petit cœur, je ne l’entendrai plus jamais battre.

 

 

04 novembre : Ce soir, nous fêtons les 3 ans de Paul et bébé se met a bouger et se place presque dans l’aine. Ma sœur a même senti où était sa tête. Il me faisait plus ou moins mal, c’était la dernière fois que je le sentirai bouger.

 

 

06 novembre : J’ai des grosses contractions aujourd’hui mais je ne m’inquiète pas car je viens de déplacer mes meubles de cuisine alors je pense que c’est normal. En plus, j’ai rendez-vous dans 9 jours, pour moi il n’y a rien d’inquiétant.

 

 

15 novembre : Aujourd’hui, j’ai rendez-vous chez le gynéco à 11h00. Je n’ai pas dormi de la nuit, je suis rongé par un sentiment de culpabilité, d'où il sort je ne le sais pas encore.

J’ai décidé de prendre Tiffany et Tom pour allez voir le bébé à la télé.

Nous arrivons dans la salle d’échographie. Je m’assois et dit au gynéco : « Bébé est très fainéant, il ne bouge pas beaucoup." Je ne vais pas tarder à découvrir pourquoi !

Je me déshabille et m’allonge il baisse la lumière et pose l’échographie sur mon ventre, il cherche une activité, un mouvement mais en vain. Le début du cauchemar allait commencer.

D’une voix triste et en même temps inquiète, il me dit : « Il y a un problème madame C., la grossesse semble arrêtée .» Je le regarde complètement déboussolée, en essayant de comprendre et d’interpréter ce qu’il venait de me dire mais les mots raisonnent sans cesse : grossesse arrêtée.

Et là, tout s’écroule. NON ! Ce n’est pas possible ! Pourquoi ? Il ne sait me répondre, cela ne pouvait pas m’arriver a moi qui avait déjà eu 4 grossesses parfaites. En plus, il y a les enfants qui sont là qui ne comprennent pas pourquoi maman pleure et je ne peux pas leur expliquer. Ils entendent les mots du gynéco : « Le bébé est très malade, il ne peut pas vivre. » tout en gardant un silence précieux. Ils se satisfont de ces mots que le docteur a dit, des mots qui sont très durs à entendre et qui ne cessent de raisonner dans ma tête : « médicaments », « accouchement », « autopsie », « devenir de l’enfant ». Je suis perdue et si seule. Mais ce n’est que le début d’une triste et courte aventure, il faut que je revienne l'après-midi pour prendre 3 comprimés afin d’aider le col a se dilater.

Je pars de la clinique, il est 11h45. Je vais chez ma sœur qui m’a gardé les 3 autres de mes enfants.

Il n’y a que 2 ou 3 kilomètres mais cela me paraît très long. Comment puis-je leur dire que c’est fini, que mon bébé est mort ?

Et mon mari, je ne peux pas lui annoncer cela par téléphone. Il est routier, mais je ne peux pas lui cacher, j’ai si peur de ne pas avoir la force.

J’arrive chez ma sœur qui me voit décomposée et se dit que quelque chose ne va pas mais qui n’imagine pas le pire pour le bébé. Tout en la regardant, en pleurant, j’ai essayé de lui dire : « Il est mort. » Elle m’a répondu : "Oh non ! Pas ça !" mais elle est restée forte car elle savait que si elle craquait en même temps que moi, c’était fini. Elle m’a prise dans ses bras en essayant de me réconforter.

Il faut que j’appelle Willy. Je ne peux pas, c’est au dessus de mes forces. Valérie le fait pour moi, elle a eu la lourde tâche d’annoncer à mon mari que tout était fini. J’ai réussi à prendre le téléphone pour lui dire : « C’est pas de ma faute. » Il téléphone à son patron pour lui dire qu’il devait rentrer.

Les minutes passent et ça me semble être des heures.

 

15h00 : Je retourne à la clinique pour prendre mes 3 comprimés. J’arrive devant la salle des naissances, je sonne et j’attend, je pleure. Quand la sage-femme est arrivée, je ne pouvais lui expliquer pourquoi je venais mais en voyant dans l’état que j’étais elle a de suite compris qui j’étais et pourquoi j’étais là.

Elle m’a installée dans une salle de repos afin de m’expliquer ce qui allait se passer.

J’ai passé ma soirée à pleurer, à me reprocher ce que j’avais fait ou ce que je n’avais pas fait.

 

 

16 novembre : Il est 09h00, je dois retourner à la clinique pour reprendre encore ces 3 comprimés. Willy vient avec moi et je dois avouer que c’était plus dur qu’hier, ce sentiment de donner la mort à la mort. La sage-femme me donne les comprimés que je mets plus d’une demi-heure à avaler entre chaque sanglot qui m’envahissait, me dégoûtait de ne pas avoir pu faire vivre mon enfant

 

17h00 : Je fais mon entrée à la clinique où une équipe formidable est venue m’accueillir et me soutenir. Willy a peur pour moi, il est aussi déboussolé que moi, il ne veut pas partir de la clinique, ne veut pas me laisser seule mais il doit aller réconforter nos enfants qui sont chez ma sœur.

 

19h30 : L’anesthésiste arrive pour remplir les papiers pour la péridurale mais je n’en veux pas. Je veux souffrir pour avoir cet enfant.

 

21h00 : Je suis seule, si seule et j’entends les bébés qui pleurent dans les chambres d’à-côté, c’est dur. J’ai écrit un poème pour ce petit bout.

                     

 

Petit être

 

Maxine ou Dahn je ne connais pas ton prénom

Petite fille ou petit garçon,

Ta naissance prématurée

A été décidée,

Ton cœur en moi ne battait plus

23 semaines tu as vécu,

Le 15 novembre j’étais blessée

Le verdict est tombé,

Avoir appris que tu ne vivrais pas

Etait très dur pour moi,

17 novembre 23 février

Seront pour toi mon bébé,

 

Je sais aujourd’hui que tu étais un garçon

Et que tu étais vraiment mignon.

 

 

22h30 : la sage-femme vient me voir en dernier pour me consacrer du temps, me demander si j’ai des questions mais à cet instant, ce n'est pas à une inconnue que j’ai envie de raconter mon malheur, alors je l’écoute me raconter comment ça va se dérouler demain. Après une heure passée dans ma chambre, elle me donne un somnifère qui m’assomme jusqu’au lendemain matin 06h00.

 

 

17 novembre : 06h00, je me lève, prends ma douche et j’attends pour aller en salle de travail, pour la naissance de notre bébé, jour qui aurait dû faire de moi une maman heureuse et comblée mais qui ne sera qu’un cauchemar.

 

07h00 : Le téléphone sonne, je dois aller en salle de travail. J’arrive, ils me branchent la perfusion pour commencer le déclenchement des contractions. Cela peut être très long, ça peut aller jusqu 'à 48h00 avant la naissance.

 

09h00 : Willy arrive enfin, je ne suis plus seule pour affronter cette épreuve si douloureuse.

Les contractions commencent à arriver, elles ne sont pas fortes mais font très mal.

 

11h00 : J’ai trop mal, je ne veux toujours pas de la péridurale mais un petit calmant dans la perfusion ne me dérange pas. J’appelle la sage-femme pour lui demander quelque chose pour me calmer, elle me met un calment dans la perfusion qui me soulage aussitôt mais m’endort.

 

13h00 : Willy repart chez ma sœur pour rassurer les petits qui s’inquiètent énormément, et comme je dors cela ne me dérange pas

 

15h00 : L’infirmière vient m’examiner, le col est ouvert à 1cm seulement. Je lui demande un verre d’eau, elle me le donne et repart.

 

15h30 : Je sens que bébé veut sortir. J’appelle la sage-femme en lui disant : « Il sort. » Et oui, bébé était là. Sans faire un seul effort, mon enfant est né.

J’ai attendu qu’il pleure, j’ai espéré mais en vain…

Il me l’ont enlevé de suite car je ne savais pas si je voulais le voir.

Une puéricultrice était là à mes côtés, àme caresser les mains, les joues pendant que je pleurais. Elle essayait de me réconforter.

Ils sont repartis et j’ai demandé à la puéricultrice d’appeler mon mari. Il est arrivé aussitôt. Je lui ai demandé le sexe de mon bébé, elle m’a dit que c’était un petit garçon, qu’il était très petit, oui mon ange ne pesait que 190Grammes pour 27 cm.

Nous avons décidé de le voir (par amour, par acquis de conscience, par curiosité je ne sais pourquoi).

Il nous ont emmené Dahn sur un chariot enveloppé d’un linge bleu avec une compresse en guise de couche il était si petit si parfait,

Une fois de plus, le monde s’écroule autour de nous, ce n'est pas possible mais si…

 

16h00 : Il faut remplir les formalités, l’autorisation d’autopsie, le formulaire pour récupérer le corps afin de lui offrir des funérailles.

 

17h30 : Je remonte dans ma chambre, seule, sans mon bébé. Je me sens si triste et me pose tellement de questions. Je dois sortir demain matin, ce n'est pas plus mal car je ne me sens pas capable de rester dans cet environnement qui sent le bonheur, c’est trop tôt.

Le soir, j’ai demandé àma sœur si elle voulait bien accompagner mon mari pour choisir l’urne et le cercueil de notre fils, elle n’a pas hésité.

 

 

18 novembre : J’ai bien dormi grâce au somnifère. Je prends ma douche, déjeune et descends fumer ma cigarette. En remontant, je demande aux sage-femmes vers quelle heure le gynéco doit passer et là, pouf  ! Plus personne ! J’ai la tête qui bourdonne, je me sens mal, je fais un malaise.

Les sage-femmes m’assoient sur une chaise, me passent un linge humide et frais sur le visage et se demandent ce que j’ai bien pu avoir. J’ai fait une mauvaise réaction au cachet contre les montées de lait.

Elles doutent que je puisse sortir.

Je retourne dans ma chambre, je téléphone à ma sœur pour lui dire bah, que ce n’est pas sûr que je sorte et lui demande s'ils ont été aux pompes funèbres, elle me répond : "Oui." et me décrit ce que Willy a choisi. Je fonds une nouvelle fois en larmes, c’était si dur à entendre.

 

11h30 : Le gynéco arrive dans ma chambre et je croise les doigts pour qu’il me laisse sortir, la sage-femme lui parle de mon malaise. Il me dit qu’il faut que j’arrête les cachets mais - Ouf ! - il a dit oui, je peux rentrer chez ma sœur. Hop, ni une ni deux, je me sauve avant qu’il ne change d’avis.

Je me sens un peu mieux d’être entourée de ma famille, des ami(es). Je rentrerai chez moi le 22 novembre car l’incinération de Dahn a lieu le 21 novembre.

 

 

20 novembre : Je passe ma journée à me demander où est mon fils. Sont-ils en train de lui faire l’autopsie ? Je me sens mal, j’ai des montées de lait horribles, je prends rendez-vous chez le médecin pour qu’elle me donne de quoi couper le lait.

Le médecin m’a donné de l’homéopathie mais ça ne se passe pas, il me faut quelque chose de plus fort.

 

 

21 novembre : Je me fais couper les cheveux j’ai envie de me faire belle pour mon fils, pour lui dire au revoir. Il est 15h00, nous partons Willy, ma sœur et moi pour la mise en bière de Dahn.

Avant de refermer le cercueil, nous lui disons au revoir, je sors de la salle, je ne peux pas assister à la fermeture du cercueil, c’est trop dur pour moi.

Nous arrivons au crématorium, il faut attendre un peu.

C’est le moment d’aller dire au revoir à Dahn, c’est si dur de laisser son enfant comme ça sans raison, ça fait si mal.

Et là, il y a un signe, une musique qui passe et Willy me dit : "Tu entends ?" C’était la musique de la publicité Kinder, le surnom que j’avais donné à Dahn et je me suis dit que j’aurais quelque chose pour me rappeler Dahn : cette musique qui tournait dans ma tête.

Il est presque 18h00, on nous appelle afin de nous remettre l’urne de notre fils. Je veux la porter mais qu’est ce que ça fait mal de porter son fils pour la première fois alors qu’il est en cendre. Oh ! Mon dieu que c’est dur.

Nous repartons du crématorium avec un grand soulagement mais si triste de se dire "Ca y est, c’est vraiment fini."

 

Nous sommes rentrés à la maison. Nous avons déposé l’urne de Dahn sur le living, comme ça il sera toujours vers nous. 

 

 

Elodie, mars 2007

 

Voir les poèmes anib13.gif "Mon sentiment", anib13.gif "Mon ange, mon amour, mon bébé" et anib13.gif "La prison de ma tristesse"

 

 

 

 

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